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Les élections – Le bureau de vote
 

Comment se tient un bureau de vote ?  Qui fait quoi ?  Le rôle du bureau : Président, assesseur, délégué de liste – Le dépouillement : scrutateur, le personnel de Mairie. Qui sait quoi ? Les règles avant, pendant et après la fermeture.
 

Tu tiens un bureau de vote? - tu es assesseur?
- Non, Présidente !

Admiratif, l'ami Facebook ave lequel j'échange. Obligée de lui expliquer :
- Certains élus de la Majorité devaient être en vacances, le Maire adjoint a bien été obligé de faire appel à l'Opposition; et même faire appel à moi "en bas du tableau", près du radiateur!


Obligée, demain, de tenir un bureau de vote ! De le présider ! Obligation ou injonction,  ou est-ce mon sens civil et civique, je ne sais. Je suis juste sûre que je serai demain, dimanche, Présidente d'un bureau de vote... Jusque-là, j’ai toujours échappé à cette tâche inhérente aux élus municipaux. Tenir un bureau de vote commence par une réunion avec les Présidents et vice-présidents des 40 bureaux. Soit une vingtaine de participants.

La réunion est dans une salle de la Mairie que je ne connais guère. 
Cette réunion commence par une course dans les couloirs. Un peu comme une partie de cache cache. Cette partie de cache cache imaginée lorsque j’ai visité la Mairie. Arrivée avec dix minutes de retard, je note le soulagement de l’Elu civil. Il vient me voir, protecteur  et je sors mon cahier de notes qui tient à montrer mon séreux. Et j’écris le premier point.

Le rendez-vous est fixé à 7H15 ! Pour ouvrir le bureau à 8 heures précises.

- Ce sont les vacances, il faut venir plus tôt !  Insiste le Maire adjoint devant les quelques murmures de mécontents.  Venir plus tôt car les premiers votants risquent d'arriver à 8 heures précises, tout doit être prêt !  Avant l'ouverture du bureau de vote, il faut les assesseurs titulaires, les suppléants des assesseurs si le titulaire n'est pas là mais qui doit être là à 8 heures. Ce n’est pas très clair. Pour moi. Pour eux aussi.
- Non, pas 8 heures pour l'assesseur titulaire, mais obligatoirement à 20 heures pour signer...
et s'en est suivie toute une discussion sur l'obligation - ou non - de l'assesseur titulaire d'être là à l'ouverture du bureau.

Il faut venir plus tôt car avant l'ouverture du bureau, il faut compter les enveloppes. Il y en a plus que d'inscrits sur le registre; il faut donc les mettre de côté. Au cas où! Tout comme il faut signaler les enveloppes sont abîmées, marquées.
Et je souris : Comme si 100% d'inscrits allaient venir voter.

Dès 8 heures, le Maire adjoint imagine donc une foule dans le bureau de vote comme sur le quai de la gare ! Mais il faut être là à 7H15 pour 8 heures… Et comme il ne cesse d’insister, je me demande s’il fait allusion au Maire de ma ville. Lors des dernières élections, il est arrivé en retard ! Pas réveillé ! À cause du changement d'heure, semble-t-l! C’est de l’humour ? Mais je m'abstiens de tous commentaires... surtout que l’Elu civil continue sur un autre registre, la réunion se poursuivant sur le cahier d'émargement.

Il faut faire signer "dans la bonne case", celle du premier tour.
Si erreur, ne pas refaire signer. D’où cette précision du Maire adjoint: Au 2eme tour, le stylo ne sera pas de la même couleur ! Je n'ose lui demander s'il fait allusion aux couleurs politiques.

Il enchaîne sur les procurations. - Il y a les procurations ! Il va y'en avoir beaucoup !
Ça, je le sais. Grâce à mes trois passages au commissariat dans la semaine. Pour porter plainte. Les policiers étaient en sureffectif et en ébullition. Ils étaient occupés avec les procurations. Et ces procurations, l’Elu civil nous en explique le fonctionnement.  Pour les électeurs avec, comment ça marche ? Et, justement, ils ne sont pas tenus de marcher. Le mandataire n'est pas obligé de faire deux tours. Pas les premiers et deuxièmes tours des élections!  Deux tours, c'est à dire prendre une enveloppe, aller dans l'isoloir puis se présenter à la table de vote. Il peut prendre directement deux enveloppes ! Un tour, deux tours, qu'importe, c'est de rester calme! L’important, c’est de ne pas tourner les talons.

Le talon du mandataire ? Là encore, toute une explication pour en arriver au « non admis à voter » qui peuvent voter. - Vont venir voter des non admis à voter a expliqué l’Elu Civil. Je me demande bien qui a pu inventer ça ! Décidément, les élus sont en mal de voix pour justifier leur existence pour en arriver à faire voter « les non admis à voter ».

L’Elu Civil a détaillé ce cas de figure. - Les "non admis à voter" sont grisés. Ils sont grisés ? Grisés à l’idée de voter ? Rectificatif : Grisés sur le registre! La ligne où figure leur nom est grisée ! Ils ne sont pas admis à voter car ils sont inscrits sur les listes consulaires donc, ils votent dans le pays où ils sont inscrits. Sauf que... et je m'en doutais qu'il y avait  un "Sauf " pas soft du tout d'ailleurs ! Ces inscrits sur les listes consulaires peuvent avoir demandé leur radiation de cette liste avant le 31 décembre; sauf qu'ils peuvent avoir demandé à voter en France, sauf qu'ils doivent le prouver, sauf que cette preuve que ces "non admis à voter"  peuvent voter est différente d'un pays à l'autre. Sauve qui peut ! Il n'y a pas de formulaire unique...
... et l’Elu civil de préciser : dans la ville, il y a 300 inscrits sur les listes consulaires ; et il a commencé à énumérer quelques pays ; et j’ai eu peur ! Peur d’une liste complète de tous les pays du monde. Ces "non admis à voter" qui peuvent voter mais qui ne peuvent prouver qu'ils peuvent voter doivent aller en Mairie (le Bureau centralisateur) qui en informe le Ministère des Affaires étrangères qui peut émettre un avis favorable, fournir une preuve  et, ensuite,  ces "non admis à voter" sont admis à voter ! Et cette subtilité démocratique explique les enveloppes supplémentaires...  et se traduit donc par une ré explication : Pourquoi il faut venir à 7H15 !

Compliquées les élections ! Et c’est bien compliqué de tenir un bureau; encore plus angoissant d'en être la Présidente. Mais je suis rassurée, le Maire adjoint précise : - Il y a les administratifs, avec des chefs de bureau... ils savent déjà tout ça ! Ce que je ne savais pas, c'est que la réunion était loin d'être terminée...

 Ma voisine pose une question sur "la dissimulation du visage",  comprendre  la burqua, mot qui sera finalement prononcé. Elle est renvoyée à la loi. Cas vite réglé. Le Maire adjoint en profite pour faire le topo sur qui est présent dans le bureau de vote? Et plus précisément, sur le délégué de liste.

Chaque candidat peut avoir des délégués de liste, il n'a pas le droit de passer derrière le bureau ! Martèle-t-il.  Propos assorti de ce point important, essentiel, primordial que je m'empresse de noter sur mon cahier pour garder tout mon sérieux :
- Mais vous avez le droit de lui offrir une chaise pour qu'il s'assoit ! Une chaise, un café même !

Ma voisine pose à nouveau, une question sur "seul dans l'isoloir, quelles exceptions?"

L’Elu Civil évoque le cas des personnes handicapées. Fort heureusement, il ne s’y connaît pas trop sinon nous aurions eu droit à la liste des différents handicaps. Il insiste sur l'obligation d'être seul dans l'isoloir. -  même le mari et la femme, c'est non !  Insiste-t-il. C'est une seule personne dans l'isoloir ! répète-t-il ; pour ensuite expliquer qu'il faut être tolérant avec les parents qui viennent avec leurs enfants, que l’enfant peut être avec son père ou sa mère dans l'isoloir. Et je me demande si je dois lui poser la question :

-Pour l’enfant, y'a-t-l un âge, une taille requise? Sauf que j'ai envie de me tailler même si la taille d'un chien m'amuse. - Un chien peut-il pénétrer dans le bureau de vote? Elle a eu le cas de figure : elle a refusé l'entrée d'un bureau de vote à un chien de grande taille qui lui faisait peur; puis elle a accepté une électrice avec un petit caniche; et le propriétaire du gros chien, quand il a vu ça (ça, le caniche et le cas), il a protesté ! C’est encore ma voisine. Chance, elle ne livre sa réflexion canine qu’à mi-voix, audible juste de son entourage. L’Elu Civil est dispensé de répondre. Y'a-t-il un point dans le code électoral qui le précise... cette question aurait encore prolongé la réunion.

-  Parce que ce n'est pas fini !  A haussé le ton le Maire adjoint. L'assemblée étant un peu dispersée. Pas fini car il faut encore parler de la fermeture du bureau. A 20 heures !


Le bureau de vote ferme à 20 heures; peuvent encore voter tous ceux et toutes celles qui sont entrés dans le bureau de vote. Et de là, un bref rappel sur l'heure d'arrivée le matin -  7H15, j'ai compris !  Et de l'importance des vacances. - Y'a ceux qui vont arriver au dernier moment !

À 20 heures, une personne du bureau doit se mettre à la porte, et la fermer ! Trop tard pour ceux qui ne peuvent pas rentrer si le bureau de vote est en incapacité de les accueillir.  Et de s'expliquer, devant les moues dubitatives, en ayant recours à un cas de figure. Il décrit la scène : Une rame de métro bondée qui arrive; les gens qui viennent voter sauf que y'a pas assez de place pour qu'ils entrent tous. Il imagine les gens forçant l’entrée, se tassant pour pénétrer dans le bureau de vote…  Comme les moues sont encore plus dubitatives, il sourit et précise : - Enfin, y'a pas de métro à [nom de la ville] !


Puis fin de la réunion. Brèves salutations. Je remercie l’Elu civil.  
- Rassurez-vous, Madame [mon nom], je suis juste à côté de vous.

Sa réunion, c’est la clé d’une élection réussie.  La clé de l'urne ! Tiens, il a oublié d'en parler ; et ça, justement, je ne sais pas. Mais je vais bien trouver, pas la clé, mais ce qu'il en est, sur internet !


Enfin de retour chez moi – j’ai attendu longtemps le bus parce qu’il n’y a pas de métro, je me connecte pour trouver la clé à ma question, et je découvre ce message :

Bonsoir
Pour le premier tour des élections présidentielles du 22 avril 2012 vous avez donné votre accord pour la présidence d’un  bureau. A ce titre je vous demande de bien vouloir être présent(e) à 7h15  afin de préparer votre bureau Je vous remercie de votre participation.

J’accuse réception de son message, je lui récite la leçon "vacances" "comptage des enveloppes" puis je lui précise ma question concernant "les clés". Et je lui donne mon numéro de fixe pour qu'il m'appelle si cette explication sur "les clés" ne peut être traitée demain. Et je fais un pari avec mon mari : - Je lui donne une demi-heure pour m'appeler !... et j'ai gagné un fou-rire, mon pari.  Le téléphone a sonné !

Et mon réveil aussi. A 6h30 ! Le dimanche, premier tour des élections est arrivé.
Après la théorie, la pratique. Très pratique, le samedi soir, je prépare mes vêtements parce que dimanche, je dois me lever tôt.
- Prière pour le Président d'être présent à 7H15! Je dois assurer.  Je veux, je peux.  Point d'honneur ! Que sur cette journée, tout se passe pour le mieux. Moi qui passe pour une farfelue au conseil municipal, pas du tout envie de leur donner raison. Jouer le jeu. Le jeu des « a voté ».


Un  pied devant l'autre, je marche dans ma ville pour rejoindre la cantine où se trouvent quatre bureaux de vote regroupés. Je marche vite, j’arrive à la hauteur d’un habitant de mon quartier. Il est facile de deviner que nous allons au même endroit. Qui aurait l'idée de se lever si tôt, un dimanche matin de vacances? Sauf pour faire son jogging !
Sa tenue : costume / cravate écarte cette hypothèse. Nous faisons chemin ensemble; il  est un dévoué assesseur dans le bureau juste à-côté du mien. Nous poireautons ensemble, avec quelques autres qui viennent d'arriver. Rien à faire ! Le personnel et la malle de la Mairie ne sont pas arrivés. Juste papoter ! Faire connaissance avec ceux et celles avec lesquelles on va passer la journée. Timide, je garde mes distances.  -
Madame la Présidente !
me dit la personne de la Mairie arrivée, la chef de bureau.  L'horreur, cette appellation correspond si peu à mon style, y compris sur le plan vestimentaire avec mon jean et mes baskets... même si j'ai fait l'effort de mettre une chemise, bien blanche et bien repassée ( que de temps passé à cet exercice !) - Madame la Présidente ! Et je note les regards interloqués des assesseurs. – C’est elle qui va présider ? L’impression d’usurper une place. Je décide de prendre les choses en main. Je pose des règles, implicites, non stipulées en réunion :
- Je suis [mon prénom]. Je précise à l'égard des assesseures - que des femmes dans mon bureau ! - Je n'y connais rien ! Seul point pratique : je suis sans étiquette ! Donc, ça facilite la tenue du bureau par rapport à la représentation des Partis... Je ne précise pas que je ces élections sont pour moi, une mascarade ; que mon bulletin de vote est un dessin Pokémon de ma fille. Puis me tournant vers la chef du bureau (donc côté personnel du Mairie) : - Et j'ai bien retenu les explications de Monsieur le Maire adjoint, vous êtes une professionnelle de la tenue d'un bureau de vote. Donc c'est super ! Avec vous, j'ai confiance... Et, ceci posé, j'étais sûre que tout allait bien se passer! L'ambiance était donnée. Sérieuse mais conviviale.

Et j'ai joué mon rôle...

Voici les clés de l'urne. Et je n'ai pas chanté "ne les perds pas, tala tâtât... " J'en ai remis une à l'assesseure la plus âgée - facile à deviner, heureusement - déclarant dans le même élan :
- Etes-vous d'accord pour être vice-présidente de ce bureau? Et, donc détenir la deuxième clé? C'est au bénéfice de l'âge, Mesdames. Et, maintenant, il en faut deux d'entre vous pour compter les enveloppes... En effet, il y en avait en plus.

Voici le registre. Et j'ai précisé : Je vous propose à tour de rôle d'aller boire un café dans la salle d'à-côté, en cours de matinée.  Pas de gobelets sur les tables ! Et ce prétextant ma maladresse... réelle ou fictive, qu'importe ! Et, j'ai demandé l'heure. Deux assesseures ont vérifié aussitôt  leur téléphone portable. Une asseuseure aguerrie, une formatée militée m'a précisée : - vous devez dire "le bureau de vote est ouvert".

Zut ! Pas moyen de déléguer cette tâche-là ! L’envie de lui dire : - c'est un peu ridicule, vous ne trouvez pas? Je suis vraiment obligée de le dire... Mais ce n'était peut-être pas le moment de parlementer; et puis, cela leur semblait tellement important, ce rituel, que d'une voix claire, j'ai donc déclaré : - Le bureau est ouvert !

Et j'ai pris place devant l'urne... C'est la place de la Présidente. Amusée ! Et la journée a commencé. Avec des anecdotes à la carte. La carte d’électeur !
- Si si ! J'ai bien reçu ma nouvelle carte ! Mais, regardez, celle-ci n'est pas finie... comme il reste de la place... La place, c'est la case où mettre le coup de tampon...
- Vous avez oublié de tamponner? Si vous saviez comme je m’en tamponne ! Ne rien dire. Le coup de tampon avec la date.  Sacré ! Les gens y tiennent...

Quelques cas sociaux : - Vous m'avez changé mon numéro? Et pourquoi je n'ai plus le même numéro? La dame, fort perturbée par ce changement, revient pour demander : - Qui a mon numéro, maintenant? Elle voulait le nom, l’adresse; et elle est revenue pour demander les coordonnées de celui ou celle qui lui avait pris son numéro !

Mais le registre est fermé. Le registre doit rester fermer, c'est une règle.
V
oilà quelques années de cela, il y avait eu justement une altercation à ce sujet-là. Avec mention au procès verbal. Une personne était venue, avait consulté et relevé les noms de ceux et celles de ses "amis" qui n'étaient pas encore venus voter, une demi-heure avant la fermeture. Le racolage ! Moi, je veux que tout soit impeccable !
Question d'honneur !  Je joue mon rôle à la perfection.

Je prends mon temps.
Pédagogue, j’explique aux enfants : - Tu vois, c'est l'urne ! Et c'est là que l'on met le bulletin. Seuls les adultes ont le droit de voter. Et c'est pour ça que tu ne peux pas y mettre l'enveloppe !
Pointilleuse, je développe sur l’enveloppe :
- Vous devez pousser votre enveloppe... Elle est coincée... Elle n'est pas descendue... je n'ai pas le droit d'y toucher.
Pernicieuse, je passe sous forme de blague, mon réel sentiment : Passez dans l'urne avant de mettre votre bulletin dans l'isoloir. Et rire de l'assesseure ! Alors j'enchaîne : Tant que "urne" et "isoloir" ne deviennent pas... urinoir !


Je prends le temps de vérifier les procurations, de calculer les âges, d’adresser des mots sympas à ces gens venus voter. Je prends le temps de bien vérifier les noms, prénoms et parfois, prendre le temps de rire. - Oui, ça fait plus de dix ans que j'ai droit à "Madame" quand je viens voter. Pourtant, c'est Alain, pas Aline ! Prendre le temps de rire... ou non. - C'est plus épouse... vous savez, moi je suis veuve depuis peu...mon mari, il venait toujours voter...

Il est important pour elle et pour plein d'autres d'aller voter.  Non pour le bulletin de vote, celui-là n'est qu'un prétexte. Non pour un candidat. Aller voter n'est même plus un acte de civisme; c'est juste sortir, parler, rencontrer des gens. Jamais la cité n'a été aussi vivante, avec les allées et venues... c'est ce que je constate  alors que je fume ma cigarette et bois un café, dehors. Une pause pour se réchauffer dehors ! Dans le bureau de vote, on se gèle. Il fait froid. Et quand je pense que c'est là que mangent les enfants du primaire le midi. Mais c'est dimanche, le chauffage est éteint. C'est jour de vote, la porte ne cesse de s'ouvrir et de se fermer. C’est toujours comme ça, dans ce bureau de vote. Même qu’aux élections précédentes, deux Maires adjoints s’étaient plaints. - Y'a pas de chauffage ! On a froid ! - Y'avait pas de lumière, ce matin !


Que voter devienne un plaisir. Que ce bureau que je préside devienne un lieu avec une minute de plaisir. La Politique, c’est un bordel et je joue un rôle de maquerelle. Jusqu’au bout !  Je propose tout particulièrement aux Messieurs :

- Et vous faites quoi, ce soir? - Vous êtes libre, ce soir? ... oui ! Super, je vous donne un rencard... rendez-vous à 8 heures... juste à la fermeture du bureau de vote...
Grand sourire de celui qui vent juste d'émarger. Je lui précise : - c'est pour dépouiller ! Il reprend sa pièce d'identité et carte d'électeur, amusé ! Et bafouille une excuse. Encore raté ! Toute la matinée, les assesseures et moi, nous scrutons les scrutateurs et scrutatrices potentiels. - Je pars en vacances. - Ma cousine arrive ce soir.- Je travaille du soir. - Je me suis levé tôt ce matin ; je me lève tôt demain matin.


Il faut des scutateurs ! Des dépouilleurs! Il en faut! Indispensable ! 
Je suis dans un bureau des moins considérés, des moins honorifiques, au cœur de la cité ; le bureau le plus éloigné du centre ville, le plus éloigné du bureau centralisateur. En fin de journée, je constate que les chaises - oups! Le banc de la cantine est resté vide : Il était destiné aux délégués de liste qui ne sont pas venus.  Même le Maire a fait un passage rapide, dans la matinée. Le conseiller général, lui, est venu dans l'après-midi, avec son photographe mais je n'étais pas là. La commission de contrôle est passée rapidement... elle ne s'est pas attardée... comme quoi, tout allait bien. Tout va bien ! 15 électeurs et électrices ont finalement donné leur accord pour venir dépouiller. Trois avec des points d'interrogation, il n'était pas sûr !


Trois isoloirs, trois tables.
Comme le nombre de table de dépouillement ne peut être supérieur à celui des isoloirs, le compte est bon! Il me faut 12 scrutateurs. Il n'y en a que sept !  Mon mari est là. Il s’est porté volontaire. Dans le bureau juste à côté. Avec mes filles. Elles ne sont pas en âge. Je fais les comptes : 7+1 = 8 puisqu'une suppléante, heureusement restée, s'y colle. Soit deux tables pour dépouiller. Je regarde l’équipe : l’assesseure, deux jeunes filles; un jeune homme, un peu plus timides ; deux vieilles dames, une dame en boubou

C'était la première fois ! Il et elles étaient un peu stressés, moi aussi ! Et je les remercie grandement ; utilisant ma formule favorite : Prenez votre temps ! Doucement comme je l'a maintes fois répété toute la journée.  

Le temps de fermer et d'ouvrir !
- Le bureau de vote est fermé.
Je déclare. Sitôt dit, le personnel attaché au bureau de la Mairie est prêt. Les bulletins de vote, les enveloppes non utilisées sont rangés dans la malle. Les isoloirs sont en train d'être démontés. Les tables du dépouillement installées. Je repasse et redis aux scrutateurs, d'un air souriant, confiant, rassurant : - Prenez votre temps ! Doucement ! Tout ira bien... Ce Tout ira bien que je suis en train d'espérer. Pour moi !

Comptage et recomptage des émargements..; et le total de 591. Le compteur de l'urne affiche 594 ! Trois de différence  mais je sais qu'l n'est pas fiable, qu'il y a un risque d'erreur. L'erreur, je n'en veux pas.  Une fois compté, recomptées les signatures, la fermeture du registre et j'insiste. - Il est maintenant déposé au secrétariat. Nous ne devons plus l'ouvrir ! Ce qui n'était pas toujours le cas; ne l'est peut-être pas encore... mais c'est la règle. Et une assesseure va le déposer. L'urne est ouverte, les deux clés rejoignent la malle,  les enveloppes sont sorties et commencent les tas de 10!

591 enveloppes. 591 enveloppes comme 591 signatures. Yes ! Le compte est bon ! 591 enveloppes dans l'urne - 591 émargements - et 591 aussi, la somme des votes nuls + voix pour les candidats et candidates. Les additions tombent juste... et du blanc. Du blanc car rien dans la case bleue où il peut y avoir  une mention au procès verbal. Je me détends ! à 100%.

Et je crois que c'est à ce moment-là que je découvre :  Il me faut aller à la Mairie, bureau centralisateur des résultats !  Il ne me l'avait pas dite, celle-là, le Maire adjoint... et m... !


Le bureau centralisateur, c’est la salle du conseil municipal.
Quatre à quatre, je grimpe les escaliers qui mènent à la salle du conseil municipal.  Souriante, euphorique même! Le coeur léger... c'est bien la première fois que j'entre ici ainsi ! A la main, j'ai le PV du bureau de vote que je présidais. Une simple feuille de papier blanc, avec les résultats. Ces résultats que j'ai annoncés, officiellement, dans mon bureau de vote, voilà environ une heure.

Ces résultats qu'une des assesseures, sur ma demande, est allée afficher à la porte.
Ces résultats qui tombent juste ! Ouf !

Juste avant mon départ pour la Mairie, là où se trouve le bureau centralisateur, les assesseures me disent :  
- A dans 15 jours !
Et de leur répondre : - J'espère que non ! Et de jouer à l’Elu Géo :
Mais je vous remercie. Je vous remercie vraiment ! Vous avez été super professionnelles. Cette première expérience - et dernière, j'espère ! En tant que Présidente d'un bureau de vote est positive. Et c'est grâce à vous ! Merci. Et bonne soirée!


Je reprends peu ou prou ces mots, à l'égard des personnes de la Mairie. Elles aussi font concilier sympathie et professionnalisme.  Sans compter que leur tâche n'est pas des plus simples. Tout écrire sur les grandes feuilles bleues, s'assurer de toutes les signatures ! - Pas question d'appeler les gens à 11 heures pour leur demander de revenir signer ! Ça, ça m'est arrivée lorsque j'étais assesseure pour les Municipales. Une fois, il nous a fallu aller chez un assesseur; il nous a ouvert en pyjama, me raconte la chef de bureau.


Mon pyjama, j’en rêve sauf que je ne sais pas où déposer ma feuille blanche, ce PV que je tiens précieusement. 

La salle du conseil municipal prend une allure de bal. Au fond de la salle, sur l’estrade, il y a le Maire qui, debout derrière un pupitre, donne les résultats à haute voix. Il la joue chef d’orchestre. Les gens sont debout qui dansent d’un pied sur l’autre.  Je croise un Adjoint au Maire, je lui demande où il faut aller déposer les résultats.

Renseignement donné, je me dirige vers le fond de la salle, longeant le grand tableau où, à la craie, sont inscrits les numéros de bureaux de vote, et déjà quelques résultats. Bref coup d'œil et je constate que je ne suis pas la dernière à venir déposer le PV.- Mon fameux "Prendre son temps" ne signifie pas avoir fait perdre du temps ! Je m'approche mais je suis interceptée par l’Elu civil. Il me félicite  et moi de même en retour, soulignant combien sa réunion était importante; de même que son appel, le samedi soir.

Envie de lui faire plaisir ! Le bonheur ne vaut que s'il est partagé ? Il reprend son air protecteur, me conduit jusqu'à la table. Je retrouve d'autres élus;  des élus de la majorité municipale et je lis en eux et elles, la même satisfaction de se trouver là. Cela signifie que le devoir est terminé. Et c'est bien la première fois que j'ai ce sentiment de partager quelque chose avec eux. Je remets mon PV, encore deux signatures. Que de signatures sur la journée et surtout, sur la soirée. Les signatures sur les bulletins nuls ! Deux signatures ! Juste deux, encore un effort !

Le Directeur de cabinet veille.
- Tiens, le Gang des chiottards en action? Aurais-je pu me dire. Même pas, je suis tellement de bonne humeur que je lui serre la main, et je crois même que je l'ai appelé par son prénom ! Nous échangeons quelques propos, des questions de sa part: - Ai-je eu des cas sur les "Non admis à voter"... qui peuvent voter ! 300 électeurs concernés dans la ville, et il a dû gérer ça, semble-t-il! Donc  le Gang des chiottards sert à quelque chose ! Je me promène un peu dans la salle. Grave erreur !   Le Maire adjoint chargé des élections m'interpelle de nouveau: - Madame [mon nom] ! Vous ne voudriez pas tenir un bureau, dans 15 jours ?


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Entre mars 2008 et mars 2014, il y a eu les élections européennes, les élections cantonales, les élections régionales, les élections présidentielles et encore les élections législatives. Et, cerise sur le gâteau, les élections sénatoriales. Cerise sur le gâteau, car dans mon département, les élections sénatoriales se clôturaient par un buffet grandiose. Des petits fours à gogo. C’est depuis que je suis conseillère municipale que j’ai pris conscience de toutes ces élections. Comme si, pour se prouver que la France est une démocratie, pour s’en assurer, le certifier, le crier, il était nécessaire de faire encore et encore des élections.  Point étonnant que les élus de la Majorité finissent par rechigner, regimber pour tenir un bureau de vote. Et c’est ainsi que l’Elu civil m’a envoyé un mail, m’a appelé, expliquant : j’ai besoin de vous !

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Et j’ai eu le droit à une nouvelle réunion : comment tenir un bureau de vote? Une réunion avec les Présidents et vice-présidents des 40 bureaux. Soit une dizaine de participants. Où je suis arrivée en retard. Je me suis encore perdue dans les couloirs labyrinthe de la Mairie.  Un peu ! Je manquais de motivation. Beaucoup. Je ne suis pas la seule à avoir eu l'idée de m'abstenir - non d'aller voter, mais d'aller à cette réunion ! L’Elu Civil a regretté le peu de présent! Je lui ai souri, moi modèle ?  Il avait plein de nouvelles choses à nous apprendre.  A chaque élection, il y a des nouveautés. Les électeurs qui ne sont pas admis à voter ne sont plus admis à voter ! Voilà qui m’arrange, la réunion va donc être courte.  Un candidat n'a pas fourni la quantité demandée de bulletin de vote. Ce sera marqué au PV. Juste laisser le dernier exemplaire du bulletin scotché sur la table; les électeurs peuvent le télécharger sur internet; ils peuvent aussi utiliser une feuille blanche et l'écrire à la main; avec le prénom, le nom du candidat et du suppléant, etc  Voilà qui m’ennuie. Une longue discussion sur la calligraphie.


Après quelques rappels encore, dont les règles de bonne conduite : pas le droit de lire le journal derrière un bureau de vote !  Trois informations clé, capitales, indispensables. Ces  trois informations clé que voici : les stylos seront de couleur bleue ;  les plateaux repas seront meilleurs ! bien meilleurs que pour les élections présidentielles !  Les tables de l'école seront recouvertes d'une feutrine bleue et rouge. Ces feutrines, j’ai eu tout le temps de les admirer ! Ce dimanche de premier tour d’élection, la journée a été longue !

Abstention a gagné les élections.

Abstention dans le bureau signifie "jamais tranquille" et "jamais occupé". Impossible de se mettre dans le rythme avec des "c'est exact", "a voté" "une signature" vous faites quoi ce soir" "Merci", "à dimanche prochain » donc regard sur la pendule, le compteur, ennui et... je baille. L’abstention des électeurs, mais encore peu d'assesseurs.

Pas de remplaçante !  donc obligée de rester en compagnie des  deux fidèles.
Deux femmes, des habituées, des indéboulonnables du bureau de vote. Déjà passé une journée avec elles. Que se dire? Pas question d'aborder certains sujets, comme la politique, évidemment. Donc, la monotonie d'une conversation... et je baille. A cela s’ajoute la chef du bureau, une inconnue des services de la Mairie avec laquelle l’entente est plus que limitée. Pas la même que la dernière fois, dommage !  Dès son arrivée, je me présente, elle me répond : - Vous avez votre convocation?


Non ! Je n'ai pas de convocation !
Elle me regarde d'un air suspect ! Zut ! J'avais portant fait des efforts, mis un chemisier blanc... repassé ! Et des baskets quand-même ! 
Lors de l'installation, elle accroche une affiche "handicapé" sur deux isoloirs. Sur deux des trois isoloirs ! Etonnée, l'une des assesseures, une habituée de chez habituée, l'interpelle. Elle est rembarrée. J'y vais, la jouant plus "diplomatique". Même topo ! J'attends donc la commission de vérification des élections pour leur demander ce qu'ils en pensent; et leur demander d'aller le signifier aux administratifs. La chef de bureau  daigne, enfin, ôter le deuxième affichage "personne handicapée » et se plaindre à moi de la méchanceté de cette commission de propagande qui pinaille sur tout.  Ce ne sont que des broutilles mais ça plombe.

Au moment du dépouillement des comptes, ça se tend.  Qui puis-je s'il n'y a que deux tables de scrutateurs? Qui puis-je s'il y a du retard sur le comptage des signatures dans le cahier d'émargement. Après le vide de la journée, c'est plusieurs personnes, une dizaine, qui sont venues voter au dernier moment. Moi aussi, j'aurais aimé que les PV soient vite signés, clos... Moi non plus, je n'étais pas contente de faire attendre les femmes de cantine, les agents pour le ménage. Je connais bien l'une d'elle, je l'aide à ranger les tables, mettre les bancs dessus  en attendant.

Enfin la proclamation des résultats que j’annonce et que j’envoie faire afficher à la porte ; et  dans la voiture pour aller à la Mairie, je baille... de fatigue !
Je monte les escaliers, j’arrive dans la salle du conseil, je découvre que je suis la dernière.  Le Maire adjoint a même téléphoné à mon domicile. Il s’inquiétait. Le Maire me sourit. C’est bien la première fois qu’il me sourit autrement que d’un rictus ou de façon forcée.  Ils sont contents de me voir. Enfin, non, ils sont contents d’avoir les résultats !

Alors, je tends la feuille blanche, le PV. Je signe et je m’en vais discuter avec mon amie. 

D'autres anecdotes sur ce blog D'autres points forts sur comment tenir un bureau de vote...  

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  • : Le conseil municipal : le théâtre vu par une novice en politique
  • : Me voilà une élue. Une élue de l'opposition. Et je découvre le conseil municipal, la position d'une conseillère municipale... Un conseil municipal, à quoi ça sert? L'envie aussi de donner un grand coup de pied; un coup de pied dans cette fourmilière. D'où mes pieds alors que les Politiques montrent toujours leur tête.
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